Par PHILIPPE CALMETTE | PRESIDENT DU THINK TANK FRATERNITE
Dans une récente chronique « géopolitique » parue dans « Le Monde » du 11 décembre dernier, Gilles PARIS intitule son texte « Avis de disparition de l’Occident ». Il fonde son analyse sur le contenu et les conséquences de la « Stratégie de Sécurité Nationale » affichée le 5 décembre dernier par Washington et l’administration de Donald Trump.
Ce texte qui encense la nécessaire souveraineté américaine sur l’ensemble de la planète pose les principes et définit les règles qui vont désormais guider la politique internationale des USA et sa stratégie géopolitique dans les prochaines décennies.
L’on pourrait, ici, essayer de se rassurer en considérant ce texte comme une lubie d’une politique et d’une administration qui pourrait être mise en minorité lors des prochaines élections internes aux USA. Ce serait à mes yeux un aveu de faiblesse du même niveau que la réaction des dirigeants européens, qui, à Munich, avaient fait confiance aux engagements du chancelier Hitler sans percevoir que le monde était en train de changer. Ce serait aussi un pari hasardeux sur l’envie d’un partenaire historique des européens de maintenir ses alliances passées alors que ses objectifs sont désormais ailleurs.
Regardons les conséquences, déjà perceptibles au cours de ces derniers mois, de cette nouvelle stratégie américaine sur les grands équilibres mondiaux que nous considérons, dans notre naïveté d’européens comme immuables.
L’administration de Donald Trump considère que le monde va désormais s’organiser autour de trois grands blocs : les USA, la Chine et la Russie et que chacun de ces blocs est légitime pour revendiquer chacun sa propre zone d’influence géopolitique et commerciale.
C’est la reconnaissance, de fait, pour chacune de ces trois puissances de sa légitimité à reconstituer des empires modernes sous influence politique, commerciale et sous dépendance militaire. Le Sud global devenant un terrain de chasse pour chacune de ces trois puissances.
Et l’Europe dans tout ça ?
La Stratégie de Sécurité nationale vilipende tout d’abord nos faiblesses en ringardisant nos valeurs et n’assigne à l’Europe aucune place significative dans la marche future du monde laissant ainsi, notamment, libre cours aux ambitions russes sur l’Est du continent.
Enfin, le corpus idéologique contenu dans le texte est un véritable programme de rassemblement des droites nationalistes européennes les invitant à combattre nos démocraties et à se rassembler en soutien de la puissance américaine.
Le comportement de l’administration américaine vis-à-vis du conflit en Ukraine et son soutien implicite à l’agresseur Russe s’explique dès lors aisément au regard de cette nouvelle stratégie. Soutenir la Russie revient également à légitimer les potentielles futures agressions internes au territoire européen ; on ne peut s’empêcher, par exemple, de penser aux Balkans et au risque de voir ressurgir les ambitions Serbes et Croates sur la Bosnie mais aussi aux ambitions russes sur les territoires baltes et sur les anciennes possessions de l’URSS.
La renaissance des nationalismes européens, source de dissensions européennes, voire de conflits armés, voilà ce que souhaite aujourd’hui la politique de Donald Trump afin de nous affaiblir et de s’assurer la servitude des Etats européens qui se placeraient sous son aile.
De même en Asie, le soutien désormais incertain des USA, à Taïwan et au Japon, participe de cette même stratégie de faiseur de conflits régionaux pour affaiblir les uns et les autres et renforcer l’hégémonie américaine.
Dans un tel contexte, de retournement des grands équilibres et des alliances conclues au lendemain de la deuxième guerre mondiale, il convient pour l’Europe de réagir politiquement et surtout de se doter de la capacité à le faire d’un point de vue économique et militaire.
Préparons-nous à la guerre pour pouvoir l’éviter.
Enfin, le sentiment européen d’un destin partagé et d’un avenir à défendre ensemble passe plus que jamais par l’affirmation des principes de Fraternité entre les Hommes et les peuples européens.
PHILIPPE CALMETTE | PRESIDENT DU THINK TANK FRATERNITE
Le 16 décembre 2025

