Par CHRISTIAN QUEYROUX | ADMINISTRATEUR DU THINK TANK FRATERNITE |DIRECTEUR D'HÔPITAL HONORAIRE | ANCIEN SECRETAIRE GENERAL DE L'EHESP
A quelques jours d’échéances électorales cruciales pour notre pays au sein d’une Europe isolée dans un monde de plus en plus inégalitaire et hostile, il nous appartient de regarder lucidement la situation.
Au-delà de la nécessité de dénoncer et de combattre sans relâche les discours stigmatisants qui constituent le fonds de commerce de tous les extrêmes depuis la nuit des temps et dont les pires incarnations datent du XXème siècle, il faut, si l’on veut s’attaquer à la racine du phénomène, à tout le moins considérer les raisons pour lesquelles un nombre croissant de nos concitoyens plébiscitent ces formations politiques.
La devise de la République « Liberté, Egalité, Fraternité » semble avoir perdu de son actualité aux yeux de populations qui se sentent, à tort ou à raison,« Contraintes, Discriminées et Oubliées ».
La fermeture des services publics de proximité au nom de la rationalité économique, la disparition des emplois, la dégradation du pouvoir d’achat des classes moyennes, les élites intellectuelles et politiques vécues comme décalées des réalités du terrain et le contexte international anxiogène contribuent à nourrir des attitudes de replis identitaire.
Régis Debray dans un essai intitulé « Le Moment Fraternité » paru en 2009 écrivait notamment que « Depuis un millénaire, les Européens n’ont acheté la valeur fraternité qu’avec des actes au service de trois missions qui les dépassaient : la chrétienté, la nation, la révolution. Trois mirages, si l’on veut, mais trois levains dans la pâte … les élans de fraternité contemporains redeviennent classiquement messianiques – sectes, mouvements charismatiques, évangélismes protestants, orthodoxies juives, confréries islamiques, et, aux Etats-Unis, religieusement patriotiques. »
A ces comportements de « Fraternité sélective » on peut rajouter le communautarisme, la préférence nationale, l’exclusion de l’autre.
A cet égard il est bon de rappeler ou d’apprendre à ceux, les plus nombreux, qui connaissent mal notre histoire, que dans un passé récent, en Europe, des partis autoritaires démocratiquement élus ont ensuite conduit des politiques de discrimination fondées sur l’origine ethnique, les opinions politiques ou religieuses.
Tout avait pourtant été promis aux citoyens, santé, prospérité et valeurs nationales restaurées, ils ont récolté persécutions, discriminations et misère en attendant la guerre.
Rappelons-nous les lignes du pasteur Martin Niemöller qui avait soutenu le parti national socialiste lors de son ascension et qui en devint opposant dès la prise de pouvoir et fut incarcéré de 1937 à 1945 en prison puis en camps de concentration :
« Quand ils sont venus chercher les socialistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas socialiste.
Quand ils sont venus chercher les syndicalistes, je n’ai rien dit, je n’étais pas syndicaliste.
Quand ils sont venus chercher les Juifs, je n’ai rien dit, je n’étais pas juif.
Puis, ils sont venus me chercher. Et il ne restait personne pour protester. »
CHRISTIAN QUEYROUX | ADMINISTRATEUR DU THINK TANK FRATERNITE |DIRECTEUR D'HÔPITAL HONORAIRE | ANCIEN SECRETAIRE GENERAL DE L'EHESP
Le 26 juin 2024
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